Page 31 - Revue Energie & Stratégie N° 57
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FOCUS









                                                              Les besoins grandissants en mobilité des personnes
                                                              augmentent, et avec eux les disparités sociales. Si le véhicule
                                                              particulier continue à s’imposer comme ultime recours pour
                                                              se déplacer, une telle situation ne serait ni économiquement
                                                              soutenable,  ni socialement  équitable,  ni écologiquement
                                                              vivable. A titre  d’illustration des besoins des populations,
                                                              rien qu’au  niveau  de  l’agglomération  de  Casablanca  :  15
                                                              millions de déplacements par jour sont prévus à l’horizon
                                                              2030 contre 11 millions en 2020, et 1,3 million de voitures
        populations, aussi bien dans les aires urbaines denses que  en 2030 contre 320 000 voitures en 2020.
        dans les aires rurales dispersées ou enclavées.       De surcroît, les transports publics sont parfois caractérisés
        Les  périphéries  urbaines  et  les  nouvelles  villes  satellites   par un manque de propreté et de sécurité et ne sont pas
        souffrent  également  des  mêmes  carences,  en  raison   adaptés et accessibles aux personnes âgées et à mobilité
        de l’absence  de l’intégration en amont des plans de   réduite.  Les  tramways,  les  BHNS  et  le  train  à  grande
        déplacements  et  d’aménagement.  Cette  situation  aggrave   vitesse représentent aujourd’hui une alternative durable et
        les inégalités sociales et pose pour les villes le défi de réguler   accessible pour ces usagers.
        les flux des véhicules particuliers et de gérer les nuisances et  f. Un secteur des taxis à la gouvernance archaïque
        la pollution qui en résulte.                          Le  programme  de  renouvellement  de  la  flotte  des  taxis,
        Si on prend  la  ville  de  Casablanca  pour exemple, elle  doté d’un budget de 4 Mrd de DH, a atteint un niveau de
        concentre le tiers des véhicules en circulation au pays.  renouvellement de 54% à l’échelle nationale et de 85% à
        d. Un territoire rural fragile et peu connecté        l’échelle de Casablanca.
                                                              Cependant, il n’a pas réussi à intégrer des voitures électriques,
        A l’échelle du milieu rural, et compte tenu de ses spécificités,
        les transports en général et celui des personnes, en   laissant ainsi passer l’occasion d’une vraie transition vers
                                                              une  mobilité  durable.  De  surcroît,  le  secteur  des  grands
        particulier,  posent  des  défis  importants:  •  L’espace  rural
        est globalement peu intégré au périmètre péri-urbain ; peu   et  des  petits  taxis  souffre d’une  fragilité  structurelle et
        connecté ou mal desservi par des transports publics en   organisationnelle, aggravée par des situations de précarité
                                                              de ses employés qui opèrent à la frontière de l’informel, sans
        commun suffisants et de qualité ;                     couverture sociale, avec un grand risque de perte d’emploi,
        • Certaines carences spécifiques aux aires rurales relèvent   sans retraite). D’autres carences dont souffre le secteur des
        de la faible couverture spatiale, - disponibilité  de routes   taxis  sont  d’origine  réglementaire  : comme  le  port  de  la
        rurales durables-, et ce malgré le programme national des   ceinture de sécurité non obligatoire, deux voyageurs peuvent
        routes rurales (PNRR2 qui a permis de connecter plusieurs   s’installer dans le siège du passager avant d’un grand taxi.
        communes rurales et Douars) ;                         Enfin,  le  système  actuel  de  gestion  des  agréments  de
        • Le problème des capacités humaines et des moyens limités   taxis semble freiner son propre essor en tant que secteur
        se pose avec acuité pour certaines communes rurales qui   contributeur à la mobilité durable. En  effet, le système
        ne  peuvent  bénéficier  de  plus  de  1  ou  2  M  de  DH  de   d’octroi  des agréments manque de transparence, sans
        budget. Des moyens largement insuffisants face à l’ampleur   oublier  la  pratique  de  transfert  non  officiel  du  droit  de
        des projets à réaliser.                               jouissance entre personnes qui empêche l’identification du
        •  Le  transport  mixte,  qui  apporte  une  certaine  réponse   véritable détenteur.
        en matière  de  mobilité  pour les usagers en milieu rural
        pose  de  sérieux  défis  en  matière  de  sécurité,  d’hygiène   g. Une pollution continue menaçant d’altérer la qualité
        et  de  respect  de  la  dignité  humaine.  Il  est  destiné  à  une   de l’air et la santé des citoyens
        population vulnérable avec un pouvoir d’achat très limité   Concernant  les  externalités  négatives  relatives à
        travaillant généralement dans les secteurs de l’agriculture ou   l’environnement, la qualité  de l’air  et son impact  sur la
                                                              santé, Casablanca détient le triste palmarès de la ville la plus
        du commerce.                                          polluée du pays à cause d’un trafic routier intense, suivie de
        e.  des  transports  publics  en  commun  insuffisants,  Marrakech et de Fès.
        inadéquats et peu accessibles                         Cette situation résulte principalement des problématiques

                                                                                                   e
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