Page 44 - Revue Energie & Stratégie N° 64
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          44 DOSSIER

                                                                               neutralité climatique.
                                                                               Pour ce faire, il a entamé un travail de fond
                                                                               sur sa stratégie de développement à faibles
                                                                               émissions de gaz à effet de serre (GES) à long
                                                                               terme  (LT-LEDS)  au  titre  de  l’article  4.19  de
                                                                               l’Accord de Paris.
                                                                               A cet effet, un processus d’élaboration
                                                                               d’une « Stratégie de Développement Bas
                                                                               Carbone à l’horizon 2050 » a été lancé,
                                                                               début 2020, afin de parvenir à une  vision
                                                                               intégrée, commune et partagée, établissant
                                                                               les principales orientations de l’économie
                                                                               et de la société marocaines entre 2020 et
                                                                               2050, et  envisageant des transformations
                                                                               économiques et sociales profondes dans un
                                                                               monde neutre en carbone.
                                                                               Ce processus s’insère dans la réflexion ayant
                                                                               été menée par la Commission Spéciale du
                                                                               Nouveau Modèle  de  Développement  du
                                                                               Maroc, et constitue un levier stratégique
                                                                               pour rendre le plan de relance en réponse à
                                                                               la pandémie de la COVID-19 équitable, durable,
                                                                               sobre en carbone  et résilient.
                                                                               Cette première LT-LEDS  vise également
                                                                               à impulser des réflexions menant au
                                                                               développement de nouvelles chaînes de
                                                                               valeur  vertes, à améliorer la compétitivité
                                                                               de  l’économie  du  Maroc,  tout  en  assurant
                                                                               sa  décarbonation  et  son positionnement
                                                                               proactif à l’export, en tenant compte des
                                                                               évolutions dans ce sens de ses partenaires
                                                                               commerciaux et notamment du « Green Deal
                                                                               » de l’Union Européenne et de la nouvelle
                                                                               zone de libre-échange continentale de l’Union
                                                                               Africaine  (ZLECAF).
           procédés.                        de sources plus diffuses (BTP, industries
          Des référents «transition énergétique»   agro-alimentaires, textiles et cuir, papier,   L’élaboration de la LT-LEDS permettra au Maroc,
                                                                               d’une part, de rehausser l’ambition climatique
          pourraient ainsi être nommés au sein des   biens d’équipement, extraction minière, etc.)
          entreprises industrielles de moyenne ou   utilisant surtout des combustibles fossiles   au-delà des objectifs de court terme affichés
                                                                               dans sa NDC, et de l’autre part, de concrétiser
          grande taille.                    (fioul, diesel, GPL, gaz naturel).   des retombées économiques sociales et
                                            On peut donc parler de situation duale entre
          30% des émissions de CO2 « énergie »   des industries grandes consommatrices   environnementales potentielles d’un mode
          concentrées dans l’industrie                                         de croissance décarbonée, et consolider son
                                            d’énergie  (IGCE)  et  celles  légères
          L’industrie marocaine représente 30% des   consommatrices d’énergie (ILCE). Les IGCE sont   positionnement stratégique international
          émissions de CO2 «énergie» dont 50%   très émettrices des GES et le coût de l’énergie   et sa compétitivité et attractivité envers
          d’émissions directes issues de la combustion   est un facteur clé de leur compétitivité.   les investisseurs et les marchés financiers
          d’énergies fossiles et 50% d’émissions   Pour les ILCE dont les procédés sont moins   internationaux.
          indirectes liées principalement  aux  usages   intensifs en GES, la facture énergétique est un   En résumé, l’élaboration par le Maroc de
          de  l’électricité.                                                   la LT-LEDS, promet des retombées socio-
                                            facteur important, mais non déterminant de
          La décarbonation profonde de l’industrie   leur compétitivité-coût.  économiques indéniables au niveau national
          passe donc en grande partie par celle                                et local, et contribuera à articuler de manière
          du secteur électrique.  À ces émissions   Les objectifs d’une ambition à long-terme   appropriée les efforts de l’ensemble des
          «énergie»,  il  faut  ajouter les  émissions  de   du Maroc          parties prenantes en  vue de :
          GES issues des processus industriels et de   Le Maroc s’est doté d’objectifs climatiques   - Concrétiser l’ambition de « Maroc champion
          l’utilisation  des  produits qui représentent   ambitieux  pour  2030  dans  le  cadre  de  sa   de l’énergie compétitive et  verte » et des
          la moitié des émissions totales de GES  de   Contribution déterminée au niveau national   territoires durables et résilients du nouveau
          l’industrie  nationale.           du Maroc (NDC) actualisée, révisée à la hausse   modèle de développement du Maroc à
          Ces dernières sont à peu près stables depuis   en 2021.              l’horizon 2035 ;
          2010 et ont tendance à augmenter moins vite   A ce titre, le Maroc souhaite continuer de   -  Aligner le plan de relance économique et
          que celles de secteurs comme le bâtiment ou   montrer la voie de l’ambition climatique dans   sociale du Maroc et ses investissements
          le transport.                     le cadre de l’Accord de Paris, à l’instar de sa   associés sur les principes de sobriété
          Parmi les secteurs industriels fortement   NDC, en contribuant pleinement et à hauteur   carbone, de durabilité et de résilience aux
          émetteurs de GES, on peut citer les ciments   de  ses  capacités  socio-économiques,  effets du dérèglement climatique ;
          et phosphates qui représentent à eux seuls   actuelles et projetées, à la riposte à l’urgence   - Donner un signal politique fort et une visibilité
          plus des trois quarts des émissions totales   climatique soulignée par les rapports du   à  moyen  et  long terme aux investisseurs
          de l’industrie marocaine. Le reste provient   GIEC, et en particulier à l’objectif global de   publics et privés et aux institutions
          ENERGIE & STRA TÉGIE | 4  ÈME  TRIMESTRE  2023
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